jeudi 20 mars 2008

A quelle guerre avez-vous participé? Questionnaire familial



Mon arrière grand-père Luzer: le conflit Russo-Japonais.

- Ah ben ça alors, mais c'était au début du siècle, du siècle précédent c'est à dire ... Mais quel âge avais-tu Zaide?
- J'avais 40 ans environ et j'étais père de 8 enfants. Je suis revenu sain et sauf et j'ai eu encore 4 enfants dont ta grand-mère.

Mon arrière grand-père Joseph: la première guerre mondiale
- J'étais officier sur un sous-marin de l'empire austro-hongrois.
- Il y avait des mers et océans dans l'empire austro-hongrois Hopa? Je n’étais pas au courant.
- Tu as raison. Ni mers ni océans. Ma base était à Pola. C'est aujourd'hui en Croatie et on dit Pula.

Mon arrière-grand-père Tauber: la première guerre mondiale
- Tu étais dans les tranchées?
- Ben oui.
- Et les boches te tiraient dessus?
- Ben non ...
- Comment ça?
- Les boches, fiston, c'était moi.

Mon grand-père Léon: la seconde guerre mondiale
- Raconte moi pépé. Dans quelle armée étais-tu?
- Je me suis porté volontaire dans la brigade polonaise de l'armée française. J'ai été fait prisonnier sur la ligne Maginot. J'ai été interné dans le Stalag VIIA en Allemagne et le Stalag XVIIB en Autriche.
- Et quand tu es revenu, ca s'est passé comment?
- A l'arrivée du train ma famille m'attendait. Mais tu sais ce qui m'a le plus ému c'est de voir mon fils, Lucien. Quand je l'avais quitté il était bébé et là, sur le quai de la gare, j'avais un petit bonhomme de 6 ans devant moi!

Mon oncle Lucien: la guerre d'Algérie.
- Tonton, alors cette guerre?
- Oh tu sais, moi j'étais dans les bureaux. Comptabilité.
- Sinon?
- Sinon rien.

Mon père: la première guerre du Liban
- Papa c'était comment?
- C'est très joli le sud Liban.
- Oui et encore?
- De très beaux paysages vraiment.
- C'est tout?
- Ah et puis je me suis fait des amis. C’était bien.

Mon ami Ido: la deuxième guerre du Liban
- Je suis au pub du coin Ido, je pense à toi. Tu te souviens quand on était tous bourrés et on s'était perdus en rentrant sur l'autoroute? Là je sens que je bois trop ... Si tu étais là tu me dirais d'arrêter.
- J'ai rencontré une fille Ido. Elle est jolie et elle me fait rire. Dommage que tu ne puisses pas me dire ce que tu en penses. C'est difficile de prendre des décisions en général, non, tu trouves pas? 

Moi: la prochaine


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mercredi 12 mars 2008

Le rhinocéros

Bloquée en blog: les mots ne décollent pas. Ce n'est pas l'inspiration, non pas l'inspiration. J'ai toujours plein d'idées et pensées qui me passent par la tête. Mais je suis bloquée.

Pourquoi? Le plus curieux c'est que lorsqu'on est bloquée, on est aussi bloquée pour expliquer pourquoi on est bloquée. C'est comme ça.

Toute la vérité: quand j'étais petite je restais souvent seule à trafiquer plein de trucs dans ma chambre. Réorganiser mes livres par exemple ou mes bibelots. Cela pouvait prendre des heures entières ... Pourquoi des heures entières? Je vais vous dire toute la vérité. Quand j'étais dans ma chambre au premier étage de l'avenue de Verdun il se passait des choses bizarres: les aiguilles de l'horloge tournaient toutes seules. Je rêvassais un peu et clac on était passé de 5 heures à 8 heures du soir sans que j'aie le souvenir d'avoir fait quoi que ce soit.

C'est pas grave docteur: non c'est pas grave du tout. Les enfants ont le droit d'avoir un monde intérieur ou ils se réfugient souvent. Et les dames qui ont la cinquantaine passée, c'est normal aussi?

Et bien ça dépend ...: dit le docteur.

La solitude: c'est comme le silence. Parfois ça fait du bien et parfois ça hurle. Parfois c'est juste un moment charnière, parfois c'est un gros bout de la vie.

Au commencement
: j'étais très seule, dans un monde à part. Je n'étais nulle part, attachée et rattachée aux gens qui m'étaient nécessaires pour vivre, comme un parasite sur un rhinocéros, partie pour l'aventure de la vie sans avoir d'identité.

Le problème: un jour l'animal arrive au bout de son chemin, s'affaisse et s'écroule. Et là, non seulement on est un parasite, ce dont en soit il n'y a pas à se vanter, mais en plus on est coincé sur une carcasse de rhinocéros. Mais qu'est ce qu'on a l'air bête comme ça, à ne rien faire, à ne rien sucer, à ne rien parasiter. Et on reste coincé, pendant des heures, que dis-je, pendant des années. On imagine dans nos rêves qu'à un moment donné la tête du mastodonte va se retourner et va nous dire: "allez, ma chérie, c'est fini, tu peux t'en aller."

J'ai la nostalgie du temps: ou j'écrivais mon roman. Je l'avais commencé l'année dernière, deux mois a peine après la mort de ma grande soeur. Dans le monde fictionnel de mon écriture, ma soeur n'avait pas survécu la shoah: elle avait été denoncée, deportée et gazée.

Je m'affaire pourtant: à plein de choses, travail, études, volontariat, ma famille , mes amies, mes petits-enfants. Je fonctionne. Oui je fonctionne... Mais parfois je m'arrête et je constate incrédule qu'il n'est plus 5 heures de l'après-midi: il est 8 heures du soir.

Copyright & copy - Nathalie R. Klein © 2008