samedi 24 janvier 2009

Les collections

Quand j'étais petite: je collectionnais les timbres. Certains me ravissaient par leur couleurs tranchantes, leurs pastels mystérieux. Quelqu'un, me disais-je, avait pris la décision de publier ce timbre. Quels étaient ses motifs? Qui etait-il?

Plus tard: sans raison précise, je me mis à collectionner les pièces de monnaie. Je pouvais passer des heures à faire rouler entre mes doigts les pièces usées et douces sous la peau. Je les connaissais toutes comme mes propres enfants. Je les surveillais quotidiennement. Ma favorite était une grande pièce datant du 19e siècle avec un portrait de la reine Victoria. Je me demandais combien de personnes avaient tenu dans leur main cette même pièce que j'affectionnais tant. Des centaines, des milliers peut-etre?

Et aussi je mettais mise à collectionner les porte-clés. Je me souviens d'un ballon de foot, d'une tète de bon banania, d'un transistor. Mon préféré? Une casserole en cuivre toute rutilante. Certains choix ne s'expliquent pas.

Durant mon adolescence je collectionnais les livres. Tout Camus, tout Beauvoir, tout Sartre, tout Mauriac etc ... En fin de compte je m'entichais de l'oeuvre de Michel Tournier en 1974 pour ne jamais vraiment m'en remettre.

A l'âge de vingt ans, je commençais ma collection la plus importante: les théières. Je reçu ma première théière en cadeau le jour de mon anniversaire, dans une chambre de la clinique de Juvisy. Je n'ai jamais oublié que ma grande soeur avait voulu me rendre heureuse ce jour-là. Aujourd'hui j'ai environ quarante théières qui ornent mon salon et ma cuisine. ma théière favorite: c'est toujours la première, cela l'a toujours été.

Durant le début de mon âge adulte je collectionnais les biberons, les langes, les sucettes, les thermomètres, les antibiotiques liquides et les nuits blanches. A l'âge de trente et un an je rendais mon tablier - l'entreprise de repopulation de la planète se poursuivit dès lors sans moi.

Pour la suite, je collectionnais encore mais les objets de mon désir semblaient plus flous. D'autres que moi se sont essayés à définir la poursuite du bonheur. Les lire ne sert à rien. Il n'y a pas de travaux pratiques non plus. Il faut se démerder tout seul pour obtenir et vivre son propre bonheur.

Aujourd'hui je crois que je commence à collectionner les souvenirs, à les trier, les contempler, les engranger. Beaucoup de lettres ont été écrites et postées, beaucoup d'argent a passé de mains, beaucoup de portes ont été ouvertes puis fermées à clé, les livres ont été lus, les tasses de thé bues, les enfants bercés, les rêves poursuivis, le bonheur vécu, parfois perdu. Tout est imprimé.


Copyright & copy - Nathalie R. Klein © 2009